Win as much as you can

En démarrage de la session de mars 2019 du Diplôme Codesign (ou « DipCo »), dont la thématique était le jeu dans les pratiques collaboratives, nous avons eu le plaisir d’entrer dans le vif du sujet avec le jeu sérieux « Win as Much as You Can », sous la houlette d’Alain Biriotti (facilitateur, membre du collectif Codesign-It! et de l’équipe pédagogique du DipCo).

Ce jeu de négociation se pratique en plusieurs groupes de 4 joueurs. Dans notre cas, il s’agissait même de groupes de binômes : 3 groupes de 4 binômes.

Le principe est relativement simple et se déroule en 10 tours, soit une quinzaine de minutes pour la partie elle-même (ajouter 5 minutes d’explications et mise en place, et 15 à 30 minutes pour le debrief).

Lors de chaque tour, chaque participant (ou binôme de participants dans notre cas) joue une carte marquée X ou une carte marquée Y pour espérer remporter un gain (en points, en dollars, en cacahuète, …)

La combinaison des 4 cartes jouées par membres du groupe détermine la répartition des gains : chaque joueur empoche ou perd une certaine somme selon la carte qu’il a lui-même jouée :

  • si 4 X sont joués, tout le monde perd 1$ ;
  • si 4 Y sont joués tout le monde gagne 1$ ;
  • si on obtient une combinaison de X et de Y, les Y perdent dans toutes les options et les X gagnent dans toutes les options (la somme des gains des X étant égal à la somme des pertes des Y).

On a donc 5 combinaisons possibles : une combinaison à somme positive, une combinaison perdante pour tout le monde et 3 combinaisons à sommes nulles.

Avant le premier tour, on donne 3 minutes à chaque joueur ou binôme pour intégrer ces options et définir une stratégie de jeu.
Durant les premiers tour, aucune forme de communication n’est autorisée entres les participants, qui ont à peine une minute pour affiner à leur stratégie à chaque tour.

Au 5ème tour, deux changements : les gains ou les pertes du tour seront multipliés par 3, et les joueurs de chaque groupe vont pouvoir se parler pendant 2 minutes pour définir ensemble une approche pour le tour.

Le jeu reprend et les premières surprises surviennent. Des éclats de voix, des rires dans un groupe ou un autre indiquent que la décision prise en commun n’a pas toujours été mise en application. Les tentations sont grandes d’empocher plus de points tout seul : après une décision de tous jouer Y, être le seul X est la garantie du plus haut score possible (3$). Une tentation très accessible et donc potentiellement assez forte.

Les tours 6 et 7 sont des tours normaux (pas de communication, pas de bonus) ; le tour 8 permet une nouvelle séquence de 2 minutes de communication et offre un bonus multiplicateur de 5. Le tour 9 est un tour normal, et le 10eme et dernier tour permet une dernière fois d’échanger et offre un bonus multiplicateur de 10.

Ce jeu amusant à jouer, parfois très drôle, offre des niveaux de lectures à tiroir.

Ca commence par son nom et sa consigne : « win as much as you can », gagnez autant que vous pouvez…

Qui est « vous » ? Chacun, individuellement ? Chaque groupe ? C’est une interprétation libre pour chaque participant.

L’intérêt majeur de ce jeu réside dans son temps de débriefing. Que s’est-il passé et qu’est-ce que ça nous raconte ? On va y trouver des groupes dont la stratégie collective aura été maximisée, d’autres dans lesquels les enjeux individuels auront prévalu ou simplement imposé leur loi.

L’optimisation des gains à long-terme repose sur une confiance mutuelle alors que des gains individuels significatifs peuvent être faits en brisant cette confiance.

La communication est par ailleurs essentiellement implicite, en particulier lors des premiers tours et illustre ainsi les situations d’ambiguïté ou les mauvaises interprétations et comment des projections négatives d’intentions qui n’existent parfois pas peuvent brouiller les pistes.

Lorsque certains joueurs démarrent en jouant X, il est aisé de leur calquer ces intentions négatives, d’induire qu’ils n’auront d’autre intérêt que le leur. Ces interprétations sont parfois très trompeuses et ne reposent souvent que sur du vent.

Si on y comprend vite que le bénéfice du collectif peut être maximisé par une démarche basée sur la confiance, on y voit aussi que si l’on joue le collaboratif aveuglément alors que des stratégies personnelles sont installées ça ne sert à rien : tout le monde (ou la majorité) en sort perdant.

Autrement dit, comme le rappelle Alain Biriotti, les comportements de Bisounours conduisent la majorité à la perte. Et le collectif a aussi la capacité à être coercitif si c’est nécessaire.

Pour éviter le jeu à sommes nulles les clés sont la confiance et la coopération.

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